« En Algérie, l’architecture est otage du logement », Hasna Hadjilah, SG du Syndicat national des architectes

La profession d’architecte, en Algérie, s’exerce­-t­-elle dans la discrimination de l’Etat ? Oui, de l’avis de Hasna Hadjilah, secrétaire générale du Syndicat national des architectes agréés (Synaa), depuis 2012. Elle reconnaît n’avoir, à ce jour, jamais discuté avec les représentants du ministère de l’Habitat, de la ville et de l’urbanisme. L’on peut d’ores et déjà imaginer l’impact du non-­communiquant (institutionnel ?!) sur un métier souffrant et très maladroitement ignoré et sous­-estimé.

 

Dans un entretien accordé, jeudi 2 juin, à Radio M, Mme Hasna Hadjilah n’a pas mâché ses mots pour dénoncer la précarité qui caractérise ce métier d’architecte, « relégué à une simple profession » alors qu’il est supposé être « au cœur du développement économique et socioculturel ».

Plus grave, à cette précarité « permanente » s’ajoute « le manque de transparence et de communication lorsqu’il s’agit de concours et d’appel d’offres émis par l’Etat ». En temps normal, le concours d’architecture devrait être le moyen, par excellence, de distinguer un projet d’un autre, soutient Hasna Hadjilah.

Hormis quelques grands projets, à l’image du siège du ministère des Affaires étrangères ou encore la grande mosquée d’Alger, toutes les autres commandes publiques, ajoute la SG du Synaa, sont cédées en tenant compte uniquement de l’aspect financier sacrifiant ainsi la qualité. « L’architecture a fini par être prise en otage », la valeur de l’œuvre est alors ignorée et la qualité sacrifiée à cause de l’urgence. « Il s’agit d’une véritable discrimination », regrette l’invitée de Radio

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  1. Mme Hadjilah n’a pas manqué à cette occasion de dénoncer une autre aberration qui caractérise l’ensemble des programmes lancés par l’Etat en matière de construction.

 

Elle déplore au passage le fait que « l’Algérie n’ait pas mis à profit les architectes algériens dans les grandes commandes de l’Etat effectuées au cours de l’embellie financière de la dernière décennie ». Pour elle, « en plus de douter de la compétence des architectes algériens, l’Etat s’est contenté de construire des millions de logements et des milliers d’établissements scolaires sans se soucier de la qualité et de l’œuvre architecturale ».

 

« Pour qu’un architecte décroche un quelconque projet, on lui exige d’être sous la coupe de l’entreprise réalisatrice de l’étude. Or, un architecte de par la loi, ne peut et ne doit pas se retrouver sous la coupe d’une entreprise. Il y a, sinon, conflit d’intérêt. Le décret 94/07 relatif à la production architecturale le dit clairement : la profession de l’architecte n’est pas compatible avec le métier de l’entrepreneur. Nous avons l’obligation d’affirmer notre indépendance vis­-à-­vis des intérêts des entreprises réalisatrices », précise Mme Hadjilah.

Elle a ensuite appelé l’ensemble des architectes à « s’exprimer et ne plus cautionner l’état de précarité qui dépeint ce métier ».